Allison J. Squires est propriétaire et exploitante de Upland Organics, une ferme céréalière familiale certifiée biologique située près de Wood Mountain, en Saskatchewan. La ferme Upland Organics cultive sur plus de 2 000 acres et produit plusieurs types de cultures, notamment des légumineuses, des céréales et des oléagineux.
Je ne suis pas née dans le milieu de l’agriculture. Loin de là. Heureusement, j’ai vécu plusieurs moments marquants qui m’ont amené à choisir ma carrière d’agricultrice biologique. Maintenant, je suis fière de dire que je suis agricultrice exploitant une ferme de production mixte de céréales biologiques et de bétail dans le sud de la Saskatchewan, avec mon mari et mes trois enfants. Et comme la plupart des autres humains, nous essayons chaque jour de contribuer de façon positive à notre environnement et à notre communauté.
Lorsque mon mari et moi avons acheté notre ferme ensemble, je n’avais pas d’idée préconçue de ce que devrait être mon rôle en tant qu’épouse d’agriculteur. Les perspectives ne sont pas souvent partagées au sein des agricultrices canadiennes qui travaillent fort. Le rapport homme-femme de la population agricole totale au Canada est près de 50-501. Lorsque nous examinons qui exploite les fermes, nous constatons que 71 % de tous les hommes qui forment la population agricole totale se définissent comme exploitants agricoles. Pour comparer, seulement 29 % de la population féminine se définit comme exploitantes agricoles. Pourquoi? Qu’est-ce qui empêche les femmes de se définir comme propriétaires et de s’attribuer le mérite de tout ce qu’elles contribuent à la ferme?
Je ne crois pas que l’égalité entre les sexes consiste à être traitée de manière particulière ou différente parce que je suis une femme. Il ne s’agit pas non plus de prouver que les femmes peuvent faire tout ce que les hommes peuvent faire. L’égalité entre les sexes consiste à accorder une valeur égale à la contribution de chaque personne, peu importe son sexe. Malheureusement, la contribution des femmes est traditionnellement perçue comme ayant moins de valeur que celles des hommes, alors les femmes continuent de la camoufler, de ne pas la reconnaitre et de la tenir pour acquise.
Les femmes qui travaillent en agriculture en Amérique du Nord font face à un grand éventail de défis en raison de leur sexe et de leur milieu rural. Le manque de services de garde pour les enfants, l’accès fiable à Internet haute vitesse et l’accès aux soins de santé sont des réalités quotidiennes pour les résidentes du milieu rural du Canada d’aujourd’hui. Les gouvernements, qu’ils soient d’ordre local ou national, doivent reconnaitre que ces défis sont des facteurs majeurs qui entravent l’avancement des femmes en agriculture et ils doivent mobiliser les ressources nécessaires pour les éliminer. Malgré ces défis, nous avons de la chance. Nous pouvons posséder des terres. Nous pouvons avoir une cote de crédit. Nous pouvons avoir accès à des fonds pour les dépenses de capital. Nous pouvons obtenir un permis de conduire. Nous pouvons voter. À travers le monde des femmes font face à ces obstacles et à d’autres obstacles importants et se battent simplement pour obtenir ce que nous considérons désormais comme des droits fondamentaux.
Selon une étude publiée par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, « L’égalité des sexes est essentielle pour garantir la sécurité alimentaire, la nutrition et chacun des objectifs de développement durable »2. Les femmes représentent près de la moitié de la main-d’œuvre agricole dans les pays en développement, bien qu’elles assument également la majorité des tâches liées à la garde des enfants, à la préparation des aliments et aux tâches ménagères. Si on leur en donne la chance, les femmes peuvent contribuer de façon incroyablement importante à l’amélioration de la nutrition et des conditions de vie dans le monde en développement. Cependant, en tant que productrices de produits alimentaires, elles sont toujours confrontées à des défis tels qu’un accès réduit à la terre, à l’éducation, à la vulgarisation, à la technologie, aux services financiers et à la représentation égale au sein du gouvernement.
Si l’on examine la composition des principaux groupes nationaux de producteurs et productrices au Canada, on peut voir à quel point une représentation égale peut faire une différence. Dans nos trois associations biologiques nationales (COTA, COG et OFC), j’ai constaté qu’elles reflétaient les statistiques sur la population agricole, comme quoi les femmes représentent 51 % des sièges dans ces conseils d’administration. Comparez cela aux groupes non biologiques et c’est une tout autre histoire. J’ai examiné les données de six groupes nationaux4 de producteurs non biologiques et j’ai constaté que les femmes ne représentent que 12 % des sièges au sein de ces conseils d’administration. Il est important de modéliser ce que nous voulons voir dans la prochaine génération, et je crois que le secteur biologique est en avance sur la plupart des secteurs de l’agriculture en ce qui concerne la modélisation de l’égalité entre les sexes.
En assistant à autant de conférences et d’événements sur l’agriculture biologique que je l’ai fait au fil des ans, j’ai vu une forte représentation de femmes au sein de groupes d’agriculteurs et agricultrices, de conférenciers et conférencières, de comités d’organisation et de participants et participantes inscrits. J’ai aussi vécu ma première expérience où il y avait un service de garde pendant une conférence sur l’agriculture biologique, ce qui, en tant que mère de jeunes enfants, est un service que j’ai énormément apprécié. Cela signifiait que mon mari et moi avions maintenant l’occasion de participer ensemble, au lieu que ce ne soit que l’un d’entre nous et que l’autre soit obligé de s’asseoir à l’arrière de la salle ou, pire encore, de ne pas y assister. Ce sont ces types de services d’entraide qui finissent par assurer l’inclusion égale et valorisée des deux sexes.
Au bout du compte, je connais ma valeur. Je sais que ma contribution est appréciée et respectée. Je sais aussi que j’ai de la chance. Je sais que ce privilège dont je jouis en tant que femme, qui est pleinement soutenue et encouragée à être elle-même, n’est pas quelque chose que toutes les femmes vivent. J’ai été très honorée d’avoir dans mon réseau d’entraide plusieurs femmes mentores et dirigeantes agricoles inspirantes qui m’encouragent et me valorisent dans mon autonomie. J’espère que, chaque fois que l’occasion se présentera, nous continuerons de travailler ensemble, de nous entraider et de préparer le terrain pour la réussite de la prochaine génération.
1 Ces données se trouvent à l’adresse https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/71-607-x/agri-fra.htm
2 Disponible sur : https://www.fao.org/documents/card/fr/c/CA2678FR
3 Disponible à : https://www.fao.org/publications/sofa/2010-11/fr/
4 J’ai examiné les six groupes suivants : Conseil canadien du canola (https://www.canolacouncil.org/), Pulse Canada (https://www.pulsecanada.com/), Canadian Cattlemen’s Association (https://www.cattle.ca/), Producteurs laitiers du Canada (https://dairyfarmersofcanada.ca/fr), Producteurs de grains du Canada (http://www.ggc-pgc.ca/) et Canadian Oilseed Processors Association (https://copacanada.com/)
Plus d’informations à propos Upland Organics ici.
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